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Comment faire du vin un placement ? | Interview BFM
- ven. 9 juin 2023 à 11:03
Guillaume Sommerer : Nous sommes vendredi, et avant le week-end on avait envie de vous parler d’investissement plaisir aujourd’hui et, plus particulièrement, de placement dans le vin. Corentin Raynaud, Responsable du Sourcing et des Relations Châteaux chez U’Wine est ici pour nous en dire plus.
On n’y pense pas forcément mais le vin peut être est un objet de placement intéressant puisqu’il prend naturellement de la valeur avec le temps, particulièrement lorsqu’il est acheté en Primeurs. Pourriez-vous nous expliquer quel est l’intérêt d’acheter en Primeurs ?
Oui avec plaisir Guillaume.
Avant de vous répondre, je vais peut-être juste rappeler pour ceux qui ne connaitraient pas, ce qu’est un vin Primeur. C’est en fait un tout jeune vin qui commence son élevage et vient d’être mis en barrique. Ce vin ne sera mis en bouteille et prêt à être livré qu’en moyenne 18 mois plus tard.
Maintenant, pour répondre à votre question, l’intérêt principal d’acheter en primeurs, est avant tout économique. En effet, c’est le seul moyen de bénéficier du meilleur prix du cycle de vie d’un vin. Le prix de sortie primeurs est plus avantageux que le prix du vin dit « livrable » c’est-à-dire prêt à être livré, embouteillé.
Acheter tôt permet de profiter par la suite de la valorisation naturelle du vin. A l’inverse acheter le vin à son apogée de consommation signifie souvent acheter au prix fort, une fois que le vin s’est déjà valorisé. Acheter en Primeurs a toujours fait partie de notre ADN chez U’wine puisque c’est un des meilleurs moyens, selon nous, de se constituer une cave de grands vins.
L’autre avantage d’acheter ses vins en Primeurs c’est d’avoir accès à des vins parfois très convoités que l’on ne retrouve plus après la mise en bouteille puisque tout est vendu.
Et étant donné la qualité du millésime 2022 c’est un avantage qui est loin d’être anecdotique. On le voit, c’est un millésime qui crée une vraie tension à l’achat. Tout le monde ne pourra pas avoir accès à certains vins.
Justement, la campagne des Primeurs 2022 a démarré il y a quelques semaines maintenant il me semble, que pouvez-vous nous dire sur ce millésime en termes de qualité ? On parle de millésime du siècle, est-ce que vous partagez cet avis ?
Ce qui est certain, c’est que ce qu’on pressentait au moment des vendanges s’est confirmé au fil des dégustations, 2022 sera bien un grand millésime à Bordeaux. Un grand millésime de garde, qui fera date.
C’est toujours un peu périlleux de comparer un millésime qui vient de naître à des monuments comme 82, comme on l’entend un peu partout. Le temps nous le dira. Mais force est de constater que 2022 a tout pour concurrencer ces millésimes d’anthologie, c’est certain.
Pour parler un peu du style des vins, il faut retenir deux choses :
- d’une part les vins présentent beaucoup de tanins mais des tanins extrêmement agréables à la dégustation, très soyeux , très intégrés dans les vins
- et d’autre part, les équilibres alcool/acidité sont exceptionnels pour une année aussi solaire. On ne s’attendait pas à autant d’acidité dans une année aussi chaude. Alors que c’est l’acidité qui apporte de la fraîcheur en dégustation.
En résumé, 2022 est un millésime prometteur en termes de dégustation, de potentiel de garde et de valorisation.
Un beau millésime on l’aura compris. Qu’en est-il du potentiel de valorisation, j’imagine que cela dépend notamment du niveau de prix de sortie de ces primeurs ?
Du prix de sortie oui bien sûr, mais aussi de l’offre et la demande.
La demande est forte pour 2022. On le voit chez U’wine, nos clients nous sollicitent depuis longtemps pour cette campagne. Cela faisait quelques années qu’on n’avait pas senti pareil engouement.
Du côté de l’offre, on peut dire qu’elle est très correcte mais pas abondante à Bordeaux. Certaines propriétés ont eu des rendements plutôt inférieurs à une année classique à cause de la chaleur. Alors ce n’est pas le cas partout, certains Châteaux sont très satisfaits des quantités produites, comme par exemple sur le plateau calcaire de Saint-Emilion. Mais globalement l’offre n’est pas pléthorique.
Avec cette qualité de vin et ces quantités parfois limitées, c’est un millésime qui ne sera évidemment pas bradé. Ceci dit, même avec des prix plutôt à la hausse, le potentiel de valorisation de 2022 reste très intéressant. On peut d’ores et déjà dire que comme 82, 2000 et 2005, ce millésime sera une valeur-sûre.
2022 pourrait même se valoriser un peu plus vite que 1982 par exemple puisque les rendements sont plus faibles, donc la rareté pourrait se créer plus vite dans le temps.
Très bien, on prend bonne note de votre enthousiasme sur ce millésime. Vous qui avez eu la chance de gouter ces vins, pouvez-vous nous guider, partager quelques domaines et pépites sur lesquelles il faut miser cette année en particulier ?
On l’a dit, cette année la moyenne de la classe est très élevée.
Mais sans surprises je dirais que les grandes propriétés ont toutes répondu présentes et ont sorti de très grands vins. Alors en particulier, on peut citer :
- Château Montrose à Saint-Estèphe qui est un des vins du millésime, sans hésitation
- Haut-Brion à Pessac Léognan ou encore le domaine de Chevalier à Pessac-Léognan qui a le mérite de produire un grand vin rouge et un grand vin blanc
- A Saint-Emilion, Figeac a produit un vin monumental avec une précision incroyable,
- Et j’ai envie de mentionner Clos Fourtet également dans cette appellation,
- Malescot Saint-Exupéry à Margaux, appellation qui s’en sort très bien cette année
Concernant les propriétés plus confidentielles, même si on parle déjà de grands Châteaux, c’est aussi cela que nous cherchons chez U’wine. Dénicher et suivre les futures grandes stars de demain, et qui offrent à date des rapports qualité/prix très intéressants et des potentiels de garde notables.
Je pense par exemple à :
- Haut-Bages Libéral à Pauillac qui ne cesse de progresser d’année en année, avec beaucoup de finesse,
- Lagrange, Langoa Barton, Branaire-Ducru à Saint-Julien,
- Beauregard à Pomerol,
- Jean-Faure à Saint-Emilion.
Très bien, merci Corentin pour ces recommandations ! Pour finir, on comprend que 2022 s’annonce exceptionnelle à Bordeaux. Qu’en est-il des autres régions ? Avez-vous déjà une idée ?
Alors j’ai un avis pour le moment un peu plus vaste puisque nous n’avons encore tout dégusté. Néanmoins en discutant avec des vignerons en Bourgogne, dans le Rhône nord, dans le Languedoc-Roussillon ou encore dans la Vallée de la Loire, 2022 est une année qui leur donne tous le sourire que ce soit en termes de quantité et de qualité.
C’est d’ailleurs cette homogénéité qu’on devine qui rend ce millésime encore plus exceptionnel. Les premières dégustations que j’ai eu la chance de faire sont vraiment prometteuses donc affaire à suivre.